Les thoniers senneurs de la Méditerranée auxquels appartiennent quarante bateaux immatriculés à Sète et Port-Vendres, seront sans doute parvenus à sauver l'essentiel d'une saison qui s'annonçait pourtant fort compromise...

Ce lundi et mardi, les vingt-cinq ministres européens de l'agriculture et de la pêche vont se réunir à Luxembourg pour adopter un plan à cinq ans visant à reconstituer le stock de thons rouges pour sauver l'espèce. Avec trois points clés : baisse de 10 % dès 2007 des quotas de capture, période de pêche limitée à six mois dans l'année, augmentation de 10 à 30 kg de la taille minimale des prises.

L'Union européenne devrait ainsi se conformer aux dispositions durement mises au point en novembre par l'Iccat (1), l'organisation qui suit l'évolution des poissons. Jusqu'au bout, les Etats disposant de pêcheries, surtout la France et l'Italie, auront tout entrepris pour retarder l'adoption du nouveau règlement (Midi Libre du 17 mai), au grand regret de Greenpeace.

A deux reprises déjà, le texte a été écarté de l'ordre du jour du conseil, faute d'accord en réunion préparatoire. Mais ce retard devient injustifiable pour les pays du nord de l'UE. Ben Bradshaw, le ministre britannique, a mis tout son poids, jusqu'à tenter d'obtenir de la Commission qu'elle se substitue aux Etats membres et décide de fermer la pêche à la date du 10 juillet, veille du conseil. Depuis, les positions ont fini par se rapprocher.

Selon nos informations, Christine Lagarde, ministre de l'agriculture du gouvernement Fillon, devrait lever l'objection française à l'adoption du nouveau règlement. En contrepartie, la France demanderait que l'augmentation du poids minimum des prises de 10 kilogrammes à 30 kilogrammes ne prenne pas effet cette année.

Si un accord intervient ces jours-ci comme c'est prévisible, il mettra en place, outre le relèvement du poids, une diminution progressive du quota de captures pour la flottille européenne. Celui-ci passera de 32 000 tonnes en2006 à 25 500 tonnes en 2010. Il imposera également l'interdiction du repérage des bancs de thons par avion mais surtout, il fixera la date de fermeture de la pêche au 1er juillet. Mais avant que l'accord soit inscrit dans le droit européen, il faudra attendre encore quelques jours. Il ne sera véritablement opposable que dans plusieurs semaines, bien après, en tout cas, la fin de la campagne libyenne.

Dans quelques jours, avec le réchauffement des eaux dans le golfe de Syrthe, le thon rouge aura achevé sa période de reproduction. Les grands bancs se disperseront, rendant inopérante la senne tournante. Ceux des thoniers qui choisirent d'opérer là-bas auront sans doute sauvé la saison. Ceux qui sont restés plus près des côtes françaises, dans la zone des Baléares où les jours de mauvais temps ont été nombreux, n'auront pas eu cette chance.

L'avenir de la pêche au thon, hier encore très lucrative, est de plus en plus incertain. On ignore ce que sera celui du poisson.

J. -P. LACAN
1)Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atl