Midi Libre 28/09/2023
En charge de la gestion des ports du Cap d’Agde, mais aussi des deux campings municipaux de la Clape et la Tamarissière jusqu'en 2021, la société d’économie mixte a été auditée par la chambre régionale des comptes sur la période 2017-2022. Les conclusions de ce rapport sont sans concession.
C’est un pavé de 80 pages qui fera immanquablement des vagues dans le port du Cap d’Agde. Un rapport édité par la chambre régionale des comptes, qui a été présenté aux élus du conseil municipal cette semaine et qui n’est pas tendre, c’est le moins que l’on puisse dire : ni avec les instances dirigeantes de la Sodéal, ni avec la, municipalité elle-même, actionnaire majoritaire de cette SEM.
Un audit où l’anonymat des personnes a été respecté, mené sur la période 2017-2022, dont nous publions ici les grandes lignes.
Une gouvernance pointée du doigt "La gouvernance se caractérise par un déficit de contrôle des actionnaires", estime la CRC. En l’occurrence la ville d’Agde, actionnaire à 73 % de la Sodéal et l’agglo Hérault-Méditerranée, à un degré moindre (un peu moins de 7 %). "Alors que le niveau d’information produit par la Sodéal à travers les rapports d’activité apparaît peu satisfaisant, les actionnaires n’émettent aucune observation et désertent les instances de direction." Au sein même de la société, la Chambre s’interroge sur les fonctions des uns et des autres.
"Si la société a, en apparence, choisi de fusionner les fonctions de président et de directeur général, en réalité, le PDG délègue depuis 2015 toute la direction générale de la société au directeur général délégué, titulaire d’un contrat de travail." Ce qui ferait de ce dernier "un mandataire social", ce que réfute la Ville dans les réponses adressées en annexe. Les conditions d’exercice du directeur général délégué de la Sodéal sont également mises en exergue.
Et elles sont pour le moins avantageuses, avec notamment un salaire XXL : "sur la période sous revue, la rémunération brute globale versée au directeur général délégué a augmenté fortement (+ 50 % entre 2018 et 2021), passant de 115 236 € en 2017 à 172 643 € (primes diverses comprises, NDLR) en 2021, alors que parallèlement les objectifs (de la société) n’étaient pas atteints." Le DG délégué avait aussi la possibilité de reporter des jours de congé, "qui lui ont permis “d’épargner” 236 jours depuis son recrutement à la Sodéal et qui lui ont déjà ouvert droit à une indemnisation de 36 293 € pour 93 jours en 2021", est-il mentionné. Un fonctionnement "irrégulier" pour la Chambre régionale des comptes, ce dont convient également la présidence de la SEM et la ville d’Agde, mais pas l’intéressé, qui conteste ce point.
Des équipements mal gérés Jusqu’en mai 2021, la Sodéal gérait en plus des ports de plaisance les deux campings municipaux de la Clape et de la Tamarissière, gestion qui a depuis été confiée à la société Cottage Parks Méditerrannée, qui a déjà investi lourdement dans ces équipements, comme le souhaitait la municipalité. Ce qui n’a pas été le cas de la Sodéal pendant des années.
"Cette activité (de gestion des campings) se caractérisait par une absence préjudiciable de pilotage et par un niveau d’investissement inadapté pour maintenir les campings attractifs" est-il stipulé dans le rapport. La Sodéal, qui n’a pas jugé bon de nommer un directeur des campings, pas plus qu’un chargé de marketing "durant quatre saisons consécutives", est accusée "de gestion lacunaire", ayant "contribué à accroître les pertes de cette activité, conduisant à la résiliation anticipée de la concession cinq ans avant son terme."
Dans ses écrits, l’organise de contrôle parle même de "résultats déficitaires pérennes" et de "potentiel inexploité." Mais les campings ne sont pas les seuls concernés. La gestion du port est également dans le viseur des collaborateurs de la Chambre des comptes. "Les installations sont dans un état de vétusté inquiétant. Cet état de dégradation, notamment des quais ouverts au public (le quai de la Trirème est pris en exemple, ainsi que le quai d’accueil, NDLR) est partiellement la conséquence du défaut d’investissement imputable à la Sodéal."
Dans son rapport, la CRC évoque des possibilités de développement de l’activité, "dans un contexte de vieillissement des installations portuaires : restructuration des emplacements, revalorisation des tarifs (qui ont toutefois été augmentés de 12 % en 2023, NDLR) et facturation au réel des fluides", ce dernier chantier ayant été lancé. Rentabilité et sous-investissement Le déficit d’investissements structurels revient souvent dans le rapport. Ce qui a au moins un effet positif sur les comptes de la Sodéal, plutôt bons ces dernières années. "Le résultat net s’améliore de manière conjoncturelle, passant de 372 000 € en 2017, à 922 000 € en 2021, à la faveur d’un produit exceptionnel d’1,2 millions € dégagé dans le secteur portuaire", explique la Chambre des comptes.
Qui ajoute néanmoins "que ce résultat global positif est intervenu dans un contexte de sous-investissement, la Sodéal ne respectant pas ses obligations contractuelles. La question de l’équilibre d’exploitation se pose ainsi au-delà de 2021, dans le cadre d’une nouvelle concession imposant 20 millions € d’investissements au délégant, auxquels s’ajouteront des travaux de sécurisation urgents. La société, pour ce faire, devra accroître sa capacité d’autofinancement et donc avoir une gestion plus dynamique des produits du port." A lire vendredi 29 septembre : le débat entre élus agathois après la présentation de ce rapport et l'avenir de la Sodéal en question.
Olivier Raynaud
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